Un peu de culture
BN : le « quatre-heures à moteur » reprend de la vitesse
La Biscuiterie nantaise a investi 6 millions d’euros pour relancer son produit emblématique, avec une recette modifiée et un nouvel emballage. Après une période d’essoufflement, le goûter fourré voit sa croissance repartir à la hausse.
[Tombée à 16 500 tonnes en 2008, la production du site de Vertou a renoué avec les 20 000 tonnes.]
Difficile de rester jeune à plus de 85 ans ! Le Choco BN connaît aujourd’hui un nouveau plan de relance et de modernisation concocté par son propriétaire depuis 1997, le Britannique United Biscuits. Créée en 1896 par des négociants pour concurrencer LU, la Biscuiterie nantaise est rapidement reprise par les familles Lotz et Cossé. Sous leur impulsion, la petite biscuiterie semi-industrielle de la place François II se tourne vers la production de masse durant le premier conflit mondial, fabriquant du pain de guerre pour les troupes américaines. En 1922, la Biscuiterie nantaise réussit son premier gros coup en lançant le Casse-Croûte, longtemps prisé des ouvriers. C’est en 1933 qu’elle invente son joyau, insérant une couche de chocolat entre deux biscuits. Mais le Choco BN, alors appelé Choco Cas’Croûte, ne devient vraiment populaire que dans les années 50. La BN perd en 1968 son caractère familial et tombe dans le giron du géant américain General Mills. Ces décennies 60-70 sont euphoriques. Le Choco BN, accompagné par des vagues publicitaires d’ampleur, est associé au quatre-heures des enfants. Les meilleures années, 20 000 tonnes du biscuit sortent des usines nantaises. Pour faire face à cette croissance, l’outil industriel s’adapte. À François II, définitivement abandonné en 1981, s’ajoute en 1963 l’usine de Vertou, au sud de Nantes, où UB France exploite aujourd’hui 35 000 m² couverts sur un terrain de 14 hectares. 400 personnes y travaillent, dont 350 à la production. Les sites de Compiègne et Carquefou, témoins de la diversification vers le salé et la biscotte, ont été cédés au fil du recentrage de la BN sur le sucré.
Phœnix après Goldorak
Au milieu des années 80, la consommation du célèbre biscuit commence à décliner. La BN met des plans en place pour la relancer, l’opération Bélier en 1986, avec la création de la BN Box, puis l’opération Goldorak en 1992. Le BN, désormais dans le groupe PepsiCo, arbore un beau sourire qui lui redonne une seconde jeunesse.
Les années 2000 sont plus difficiles. Le Choco BN doit faire face à une concurrence accrue avec l’arrivée sur le marché des marques de distributeurs. Aujourd’hui UB France pèse un peu plus de 10 % du marché du biscuit en France avec entre autres le BN, décliné en six parfums, le Mini BN, plus ses marques Delacre et Verkade. L’évolution des modes de consommation, les discours nutritionnels défavorables au sucré, ont amplifié la tendance. Dans les années 2003-2004, UB lance « un nouveau programme de redynamisation de la marque et de ses piliers », relate Bernard Saje, directeur du site de Vertou. Ce plan, baptisé Phœnix, vise à répondre à une demande en évolution. Le résultat de cette réflexion s’est retrouvé sur les linéaires en avril 2009.
S’il a gardé son sourire, le nouveau Choco BN a vu sa recette et son packaging modifiés en profondeur. Le biscuit est désormais fabriqué à partir de céréales complètes, afin de renforcer son apport énergétique. Il est sans matières grasses hydrogénées, ce qui « répond à une attente réelle des mères de familles. Nous sommes les premiers à le faire pour les biscuits fourrés », note Bernard Saje. Ces modifications ont donné au BN plus de croustillance. Afin de mieux conserver cette texture, l’emballage a été modernisé. Une nouvelle technologie de scellage renforce l’herméticité. Et pour conserver aux biscuits leur fraîcheur, BN innove avec son sticker qui permet de refermer le paquet, à la manière du café. Le nouvel emballage est également moins impactant pour l’environnement car il est à base de carton ondulé non traité et recyclable. Dernière modification, et pas des moindres, le paquet a rétréci. Pas de panique pour les gourmands, le grammage n’a pas changé, le nombre de biscuits non plus. Le paquet est plus compact car les seize biscuits sont désormais sur une seule pile. « Nous répondons à un besoin de praticité de la distribution comme du consommateur », commente Bernard Saje.
Retour aux 20 000 tonnes
United Biscuits a investi 3 millions d’euros à Vertou dans cette opération de renouveau du BN. Un tiers de la somme est allé à l’adaptation du process industriel de fabrication du biscuit, le reste dans le nouveau conditionnement. Et pour accompagner le lancement commercial, près de 3 millions d’euros ont été également consacrés à une campagne de communication multisupports (cf. encadré). En dépit de ces investissements et du coût de fabrication plus élevé, le prix du paquet de BN n’a pas augmenté, restant aux alentours d’un euro quinze en grande distribution. La biscuiterie compte rentrer dans ses frais en améliorant la performance de son outil industriel et en dopant la production. Les faits semblent lui donner raison : tombée à un plus bas de 16 500 tonnes en 2008, la production du site de Vertou a renoué avec les 20 000 tonnes. Le BN, qui pèse la moitié de ce tonnage avec près de 150 000 paquets sortis par jour, a crû en volume de 15 % en 2009 par rapport à 2008. « La tendance semble se poursuivre en 2010 », savoure Bernard Saje, qui imaginait « une réponse des consommateurs plus étalée dans le temps ». La progression de Vertou est aussi due au rapatriement du Casse-Croûte, auparavant fabriqué en Espagne, et à la relance de la gamme Mini BN (nouveau parfum vanille, format familial modifié). La croissance visée pour 2010 est de 15 à 20 %. La MDD y participera : elle sera « forcément un relais de croissance » pour le futur, indique le directeur. L’usine de Vertou avait été secouée en 2006 par des événements sociaux et des rumeurs de vente. Aujourd’hui modernisée et redynamisée, elle semble prête à écrire une nouvelle page de la longue histoire de la Biscuiterie nantaise et de son produit phare.